Interchangeabilité des luttes (convergence des luttes)

L’interchangeabilité des luttes est un dysfonctionnement organisationnel consistant, pour un groupe politique, à voir son message politique brouillé, ses efforts stérilisés, sa voix affaiblie, sa cohésion dissoute et ses soutiens siphonnés, sous l’effet du dogme de la convergence des luttes. Ce problème peut en théorie toucher n’importe quel groupe politique, mais a particulièrement affecté le féminisme de gauche des années 1970 à 2020. La notion d’interchangeabilité des luttes appartient au corpus théorique féministe occidentaliste et est un outil de réflexion sur la praxis féministe. Le féminisme occidentaliste considère que le dogme de la convergence des luttes mène inévitablement à l’interchangeabilité des luttes, et que l’interchangeabilité des luttes se fait toujours au détriment des féministes, puisque toutes les sociétés humaines connues à ce jour reposent à des degrés divers sur la valence différentielle des sexes, la relégation des femmes dans le champ de l’informel, la larbinisation des femmes, l’extorsion périnatale et l’invisibilisation du travail féminin.

Exemples de groupes politiques ayant fait subir des phénomènes d’interchangeabilité des luttes à des groupes féministes

  • gauche en général
  • anticapitalisme
  • antiracisme
  • écologie de gauche
  • lobby œcuménique
  • anarchisme de gauche

Les effets du dogme de la convergence des luttes sur le féminisme

L’interchangeabilité des luttes nuit au principe de non-substituabilité du féminisme. Le dogme de la convergence des luttes développe la croyance en l’interchangeabilité des luttes :

« Si je fais quelque chose pour l’antiracisme, je fais avancer la cause féministe. »

« Si j’arrête de manger de la viande, je mets à mal le patriarcat. »

« Si je cesse d’attaquer les religions misogynes, je fais un geste pour l’inclusivité, et donc pour le féminisme. »

L’interchangeabilité des luttes est un terreau favorisant l’entrisme, la larbinisation des féministes et l’autocensure.

Interchangeabilité des luttes et tyrannie de l’absence de structure

L’interchangeabilité des luttes dont le féminisme est souvent victime est intimement lié à la tyrannie de l’absence de structure, aussi appelée tyrannie de l’horizontalité. En effet, l’absence de formalisation et d’explicitations des structures et des hiérarchies crée un terreau favorable à l’établissement de hiérarchies et rapports de pouvoir défavorables aux femmes. L’essentiel de la domination masculine exercée sur les femmes se produit dans le champ brouillé de l’informel : les sentiments, les relations interpersonnelles, l’espace domestique, les réseaux professionnels informels, les non-dits.

Le mythe du protectorat viril, pendant conservateur du mythe de l’interchangeabilité des luttes

Le mythe du protectorat viril est le pendant conservateur du mythe de l’interchangeabilité des luttes. Dans les deux cas, il s’agit de présenter un modèle de société « idéale » dans laquelle on « n’aurait pas besoin du féminisme ». Pour la gauche, cette société idéale est la société d’égalité parfaite. Pour les conservateurs, cette société idéale est le patriarcat bienveillant. Les féministes doivent se protéger de ces tentatives de nier la nécessité du féminisme en réaffirmant sans cesse le principe de non-substituabilité du féminisme.

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